中欧社会论坛 - China Europa Forum

Paris, Photo : Yuanshan

Afin d’encourager un dialogue plus approfondi, le Forum Chine-Europe, avec le soutien des Amis de l’Europe, a invité des experts chinois à débattre avec leurs homologues français lors d’une seconde réunion à Paris le 9 mars. Dans la délégation française se trouvaient des témoins du rapide développement urbain qui s’est produit en Europe des années 1950 aux années 1980.

Cette réunion avait pour objectif de favoriser un dialogue sincère et constructif entre les représentants des sociétés chinoise et européenne, et de promouvoir une meilleure compréhension mutuelle, qui traiterait de manière appropriée des défis universels de notre temps.

La présentation des expériences européennes, des réussites aussi bien que des échecs a donné lieu à une discussion animée sur les concepts et les pratiques favorables au développement durable des villes de demain.

La déclaration franche de LI Tie, directeur Général du Centre Chinois pour le Développement Urbain, de la NDRC de la Chine, a illustré une analyse complète et pertinente de la situation du développement urbain en Chine. Les principaux problèmes environnementaux et sociaux générés par le développement rapide des villes chinoises sont une grande préoccupation pour les responsables et les experts chinois. Cela a suscité une série de débats sur les contre-mesures possibles à ces questions difficiles. D’autre thèmes ont été abordés comme la nécessité urgente de développer des systèmes de transports publics, la nécessité de planifier conjointement les zones urbaines et rurales, la mise en place de systèmes de droits juridiques, la réforme du système administratif, la question des inégalités sociales etc.

Beaucoup de problèmes communs ont été identifiés. Et chaque côté a exprimé sa volonté d’y répondre ensemble.

Avec le soutien de :

Pierre Calame
Président, Forum Europe-Chine ; Expert en Questions Urbaines ;
Auteur de nombreux travaux et articles sur les Villes et les Territoires du 21ème siècle ;
Ancien Directeur Adjoint, Département de l’Urbanisme, Ministère Français de l’Equipement

“Le développement des villes européennes au cours des cinquante dernières années présente un certain nombre de traits communs mais aussi de très nombreuses différences. Les villes européennes actuelles constituent donc un vaste vivier d’expériences dans lequel les sociétés d’urbanisation plus tardive, en particulier la société chinoise, peuvent puiser : pour en tirer éventuellement de ce qui leur semble le plus réussi et en comprendre les conditions de succès ; pour mieux identifier les facteurs déterminants des formes d’urbanisation adoptées et leurs conséquences ; enfin, pour tirer des leçons des échecs afin d’éviter de les reproduire.

Comment bâtir un ville plus vivante, durable, et capable de s’adapter au fil du temps ? Nous ne pouvons pas nous intéresser uniquement à enseigner l’urbanisme, mais aussi les facteurs économiques, sociaux, politiques et techniques.”

La Seine, Photo by Jingxinrusi

Pierre Mayet
Rapporteur, le 6ème plan Quinquennal (1972-1977) de la Commission des Villes ;
Directeur Exécutif des Ressources Humaines, Ministère Français de l’Equipement

“Il est nécessaire de comprendre que le réveil a eu lieu entre 1965 et 1970 : la France n’était plus un pays rural, mais était rapidement en train de devenir un pays urbain. Cette Révolution ’Culturelle’ a créé une nouvelle perception de la société à l’époque.

Aménager un territoire selon des standards généraux est impossible, car chaque territoire est en soi une partie singulière de la planète. Il a sa propre géographie. Ainsi, chaque plan qui est créé doit être inventé pour un territoire déterminé. Pour faire ce plan, il est nécessaire que le territoire possède une intelligence stratégique – c’est-à-dire une organisation désireuse de mettre sont intelligence au service des différentes autorités de ce territoire.”

Francis Cuillier
Président, groupe « Gestion des Transports Urbains » du PREDIT 2, (Programme de Recherche Interdépartemental sur les Transports)

“Le problème de l’aménagement urbain se trouve au carrefour de l’échelle de temps et de celle de l’espace. Nous devons nous projeter dans le long-terme car la mise en œuvre est lente, mais une fois les réalisations finies, il se peut qu’elles ne correspondent plus aux besoins ou même créent de nouveaux problèmes”

Jean Loup Drubigny
Directeur, Secrétariat de URBACT

“Le droit d’installation dans les régions urbaines et rurales est libre dans toute l’Europe. Rien dans la législation ne peut empêcher un rural d’aller dans une grande ville occidentale.”

Thierry Gaudin
Ancien Directeur, Centre de Prospectives et d’Evaluation, Ministère Français de l’Industrie

“Nous estimons que les villes du XXIème seront différentes de celles du XXème. A l’échelle mondiale, les « réfugiés climatiques » iront vers des espaces devenus habitables, ou quitteront des espaces devenus moins habitables.

Dans la ville du XXème, se concentre la main d’oeuvre qui fabrique des biens matériels. Dans la seconde moitié du XXème, l’emploi est plutôt tertiaire. Au XXIème siècle, les activités industrielles demandent moins de main d’oeuvre. Quant aux activités tertiaires, elles auront moins besoin d’être concentrées, car grâce aux communications par internet, les activités peuvent être réalisées à distance. ”

Elie Faroult
Vice Président, ONG “Petits débrouillards”

“En France,les gens vivent à la campagne, ont les mêmes services urbains que les citadins dans les villes. Aujourd’hui, les plus de constructions en France se trouvent dans les environs de 20km des villes. La France est en quelque sorte une grande ville de 60 millions d’habitants !

Sur l’évolution des villes, nous avons beaucoup d’expériences, mais uniquement du passé, on n’a pas d’expériences de l’avenir. Avec les nouveaux modes de télécommunication, on peut s’installer dans un endroit qui dispose d’un réseau complet de communication, de l’eau, de l’électricité, etc, ce n’est plus nécessaire de se rassembler physiquement comme jadis. Face à cette évolution de la notion des villes, nous pouvons réfléchir ensemble faisant face aux mêmes préoccupations à l’avenir. ”

“La cité […] se formant pour permettre de vivre, elle existe pour permettre de vivre bien” - Aristote, philosophe grec.

Tie LI
Directeur Général du Centre Chinois pour le Développement Urbain, Commission Nationale pour le Développement et la Réforme (NDRC) en Chine

“Il est nécessaire de lancer une série de réformes pour répondre aux problèmes de l’urbanisation chinoise. Pour commencer, et même si, cela prendra probablement des années avant d’être mis au point, le système du permis de résidence (Hukou) devrait être abandonné pour permettre à la population de se déplacer librement. Ensuite, nous devons accélérer la réforme foncier.

La réforme administrative en Europe a montré que la décentralisation est un impératif. Le gouvernement central chinois a un contrôle disproportionné sur la gestion des villes. Nous devons réformer la gouvernance urbaine et simplifier le système hiérarchique en réduisant les niveaux administratifs locaux et en donnant une plus grande autonomie à chaque ville.

Le système administratif d’agrément et d’autorisation nécessaire à l’établissement d’une ville devrait être progressivement réformé. Les villes ayant déjà satisfait à ces exigences devraient bénéficier d’une autonomie totale et du véritable statut de ville.

Le développement urbain nécessite des approches multidisciplinaires et la coordination entre les différents acteurs, y compris les architectes, les sociologues et les économistes. Par conséquent, la Chine doit résoudre les problèmes de son système d’aménagement urbain en permettant aux experts chinois dans le domaine de l’urbanisme de travailler ensemble.

J’espère que nous pourrons renforcer nos collaborations et nos échanges afin de saisir l’essence des expériences européennes et ainsi urbaniser la Chine en évitant de tomber dans l’imitation superficielle.”

Bin DAI
Professeur, Vice Doyen, Ecole d’Administration Publique, Université de Southwest Jiaotong

Ces dernières années, la population suburbaine est devenue l’une des questions les plus préoccupantes posées par l’urbanisation en Chine. Les principales caractéristiques de ce phénomènes sont : la croissance rapide de la densité de cette population suburbaine, l’urbanisation des terres agricoles, et le nombre croissant de travailleurs migrants dans les zones urbaines.

Nous avons constaté trois raisons principales à ce problème. Tout d’abord, la plupart des travailleurs migrants préfèrent vivre dans les banlieues où le niveau de vie et les coûts sont relativement bas. Ensuite, les citadins aisés choisissent de vivre dans la périphérie où l’on trouve plus d’espace et un meilleur environnement naturel. Enfin, à cause de l’étalement urbain, beaucoup d’industries et de possibilités d’emploi se développent dans la périphérie. Cette migration est à l’origine d’une série de problèmes, comme de sérieux encombrements de la circulation, un aménagement péri-urbain incontrôlé et désordonné, des pollutions, et des disparités ville-campagne.”

Xiaodong LU
Vice Président, Association de Chengdu pour les Sciences et Techniques

“Le processus d’urbanisation lui-même montre que la ville est plus attrayante que la campagne. Toutefois, à cause du manque d’espace pour l’étalement urbain, il serait judicieux de s’intéresser à la façon dont la ville et les zones rurales peuvent bénéficier l’une de l’autre.

L’ouverture de la société est une tendance inévitable, tout comme l’urbanisation. La question qui subsiste en Chine est de savoir comment donner à la population le droit de circuler et de résider librement. Une solution consiste à réformer le système de permis de résidence et à éliminer les disparités ville-campagne.

Il est encore plus important de discuter sur la façon dont les Chinois est les Occidentaux comprennent le concept d’urbanisation”

Qingming ZHAN
Professeur, Vice Doyen, Ecole de Design Urbain, et Directeur Adjoint du Centre de Recherche pour la Ville Numérique, Université de Wuhan

“La situation du développement urbain en Chine s’améliore progressivement. En 2008, la loi sur l’Aménagement Urbain a été remplacée par la loi sur l’Aménagement Urbain et Rural, conçue pour promouvoir l’équilibre entre le développement urbain et le développement rural. Ce changement reflète également que les responsables se sont rendus compte que le développement urbain ne devait plus se faire au détriment des zones rurales.

Par ailleurs, on constate un autre changement en Chine. Par le passé, l’aménagement urbain était une sous-discipline de l’architecture. Aujourd’hui, c’est devenu une discipline à part entière, au même niveau que l’architecture. L’université de Wuhan a saisi l’opportunité pour mettre en place un cursus sur l’Aménagement Urbain et Rural et a porté la durée de la licence à cinq ans. D’une part nous offrons des cours dans des disciplines en rapport comme les sciences sociales, la sociologie et l’écologie. D’autre part nous avons également ajouté des éléments sur les nouvelles technologies comme la technologie de l’information géographique, la détection à distance, le GPS, et les technologies de l’information et de la communication (TIC).”